Dr Pepper & Pastrami, NYC [USA]

A Manhattan, on n'est jamais très loin d'un quartier qui rappelle la dernière fois qu'on est allé à Manhattan. Sortie de l'appartement très tendance de Bob et François le matin même, loué à Jersey City, j'arrive à la station de Path et en quelques minutes, je me retrouve sous ce qu'il reste de deux tours jumelles qui n'avaient d'attrait que leur emplacement, avant qu'un taré ne décide d'en faire le symbole de la fragilité et du mal que peut engendrer le fanatisme.

J'avais aimé en 2001 l'épicerie mormone à quelques pas de là, avec ses plats cuisinés délicieux et incompréhensibles, ses mélanges de fruits secs, son carrelage ancien et son patron sur une estrade derrière sa caisse enregistreuse qu'il n'aurait confié à personne, même sur son lit de mort.

Je ne la retrouve pas tout de suite et entre dans ce Deli, où les buffets chauds et froids, les biscuits et chocolats sur les hautes étagères en bois n'existent que dans New-York.

Opter pour un sandwich semble une bonne option car mes jambes tremblent : j'ai arpenté ces trottoirs sous un soleil de plomb et de septembre, allant de la décevante Little Italy de carte postale à la trop courte Chinatown, faisant un crochet dans Century 21, le grand magasin de dégriffés plutôt hors budget pour qui fait un tour du monde et rempli de tenues ayant appartenu davantage à Nancy Reagan qu'à Michelle Obama.

Mais pour commander un sandwich, il faut avoir à la fois du temps et un diplôme de gestion de projets : pain normal, de mie, de mie complet…? Pastrami avec ou sans cholestérol ? Fromage Swiss ou pas ? Toasté ou froid ? Et j'en passe…

Harassée, je prends la première boisson qui me tombe sous les yeux : un Dr Pepper. Ca fera film de Woody. Grave erreur : c'est imbuvable. Une sorte de limonade très sucrée à la cannelle. Qui est réellement ce docteur à l'esprit tordu qui a recyclé ses fonds de sirop pour la toux ?

Je passerais l'après-midi derrière la vitrine qui donne sur la sortie des bureaux, devant le grand poster de montagnes enneigées du Montana.

Vengeance : je passe au 7 Eleven acheter deux Coors pour ce soir. Le jeune homme à la caisse me demande gentiment ma carte d'identité. Je lui avoue être flattée qu'il doute du fait que j'aie plus de 21 ans. Il me répond que le doute est permis. C'est une belle journée…